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Eu égard aux activités jusqu’à présent racontées, tout semble apparemment une réussite. On a peu fait cas des difficultés et échecs rencontrés. Il semble juste d’en évoquer quelques-uns, même s’il sera difficile de les documenter par des photos illustratives comme nous en avions l’habitude.

Nous avons déjà évoqué la question de la qualité du sol lors du premier achat (Cf. chronique Remontée au fil des années – I) Cette difficulté ne semble pas la majeure eu égard à d’autres qui sont plutôt de l’ordre humain. En effet, le goût effréné de l’argent pousse des présumés propriétaires terriens à s’approprier du domaine des autres ou à vous faire croire qu’ils disposent d’un espace plus étendu. Malheureusement les services de l’état sont parfois complices de cet état de fait. D’une part, on ne disposait pas encore d’un registre foncier permettant d’identifier les vrais propriétaires terriens. De l’autre, le certificat de non-litige délivré lors d’une acquisition pouvait se révéler plus que faux, le délégué lui-même voulant juste se faire quelques sous sur votre dos. Lors de problèmes, le service des affaires domaniales de la Mairie se dégageait de toute responsabilité. Nous avons eu à rencontrer quelques cas heureusement très limités.

Une autre difficulté propre au milieu humain était celle de l’appropriation par ceux qui utilisaient le terrain avant son acquisition. Soyons plus concrets. Au cours d’un achat de parcelles, il fallait s’assurer que tout ce qui y avait poussé comme arbre était compris ou non dans le prix. Sinon vous risquiez de voir des gens venir fréquemment sur votre domaine récolter les fruits d’un arbre ou en couper les branches, juste parce qu’ils estiment que c’est eux qui les ont plantés. Somme toute, à chaque milieu ses réalités sociologiques.

De nos jours, le vol est également, trop récurrent. Il s’opère de jour comme de nuit avec la complicité des voisins qui voient la forfaiture s’opérer mais craignent pour leur vie en cas de dénonciation. Les accords de bon voisinage ne suffisent pas. Il faut une surveillance régulière pour sauvegarder le fruit de ses labeurs et de ses lourds investissements.

Ces aspects que nous venons de souligner peuvent s’appliquer à tous genres d’entreprises agricoles. Il ne faut pas minimiser aussi tout ce qui concerne la maintenance des engins de production, tracteur, groupe électrogène ou autres pannes similaires, ou encore des enlisements des moyens de locomotion vous mobilisant durant tout une journée de travail. Tout cela vous prend à l’improviste paralysant parfois les activités en cours. Le grand mal est le manque de fiabilité des ouvriers chargés de procéder aux réparations, sans oublier la grande difficulté à trouver des pièces de rechange.

Pour notre cas, il a fallu au départ faire le compte avec les reptiles ou autres animaux sauvages : serpents, renards, varans, caïmans etc… Il faut s’armer de courage quand vous faites face à ces genres d’animaux qui ne sont pas heureux que vous veniez les perturber dans leur milieu naturel de vie. Parfois ce sont les pintades ou les poules qui couvent des œufs, qu’on retrouve mortes, si ce ne sont pas les oiseaux rapaces qui surgissent pour ravir les petits poussins ou pintadeaux. Ce sont des risques ou casses récurrentes, liées à toute entreprise du genre.

Une prose de quelques lignes ne suffit certainement pas à décrire les nombreux dangers insoupçonnés, encourus lors des tours de la ferme que nous faisions à pied. Seule la grâce divine qui connaît nos limites et faiblesses nous a toujours préservés de rencontres impromptues et nous a protégés de bien de dangers. Cette même grâce nous a de temps à autre fait toucher du doigt la force de son action lorsque nous voyons filer devant nous des reptiles venimeux, nous rassurant ainsi qu’elle demeure avec nous dans cette œuvre.

Un jour me raconte Léon, alors qu’il faisait une de ces visites habituelles de routine dans la partie marécageuse pour s’assurer du bon ordre qui y régnait, il entendit le ronflement puissant et même assourdissant tel un moteur et s’émerveilla que quelqu’un puisse piloter un engin à moteur jusque dans ces bas-fonds boiseux. Lorsque le même bruit se reproduisit, il conclut de par expérience, que c’était plutôt un caïman, qui perturbé dans sa sieste, s’énervait de la présence humaine.

Voici un épisode vécu par moi-même. En 2016, j’accompagnai à la ferme une laïque amie pour lui faire voir nos projets. Elle était très intéressée par le petit ruisseau qui s’écoulait le long de notre propriété et qui lui rappelait des scènes de son enfance au village à Adjarra lorsqu’elle se rendait au marigot. Pour aller à ces endroits touffus où l’on pouvait toujours rencontrer des reptiles non désirés, je me faisais toujours accompagner de Léon. Cette fois-là, j’en fis de même et fort heureusement !

À quelques pas de la source d’eau, Léon, devant nous, accéléra brusquement ses pas vers une touffe d’herbes et asséna quelques coups de coupe-coupe à quelque chose, plutôt imperceptible à nos yeux. Il y dégagea un des serpents les plus venimeux de la région, un cracheur de couleur noire barrée de blanc. La frayeur me saisit, moi et notre hôte, surpris que nous fûmes d’être si près d’un reptile dont nous ne soupçonnions même pas la présence. Il faut reconnaître que Léon, qui accompagnait parfois son père à la chasse nocturne, avait acquis le feeling de ses hommes qui savaient détecter au moindre bruit la présence d’un être étranger. Il savait écouter la nature, tout au moins flairer ou en percevoir des signes couvant des risques. Il faut admirer son courage voir sa témérité, son impassibilité devant le danger. Dieu l’a aussi gratifié d’yeux perçants. Lorsque je parcours les champs à ses côtés, sa présence me rassure, tel celle d’un ange-gardien humain que le Seigneur a daigné placer sur ma route.