Avant de présenter les différentes thématiques de la présente chronique, abordons un aspect de l’organisation du travail en réponse à une question initiale: à quel moment de l’année le fermier se donne du repos?
Sous d’autres cieux, les fermiers disposent souvent de peu de temps de loisir ou de repos. Il y a plus d’une vingtaine d’années en Allemagne, il m’a été même rapporté que ceux qui s’engagent dans les travaux agricoles à titre professionnel, ont du mal parfois à se marier. La difficulté de convoler des noces avec une âme sœur serait liée au fait que ce métier, vu ces exigences, laisse peu de place à la possibilité de s’offrir des vacances bien méritées avec la dulcinée. De guerre lasse, les compagnes finissent par se lasser d’une vie sans compensation ludique.
La même observation ne se vérifierait certainement pas sous d’autres cieux où l’organisation du travail obéit à d’autres paramètres. Sur le continent noir par exemple, la notion de vacances en famille peine pour l’heure à s’imposer même au sein des professions libérales. Pour certains, le paysan africain serait désœuvré en dehors des saisons pluvieuses, puisque les activités tourneraient au ralenti durant la saison sèche; ceci n’est pourtant qu’une apparence, la jouissance d’un vrai temps de relaxe n’étant pas si évidente. Beaucoup d’autres activités occupent également le clair de son temps : récolte et aménagement des espaces de stockage, réparation des instruments de travail, fauchage des espaces herbeux destinés au prochain labour. Il faut y ajouter qu’il doit joindre le devoir et même l’agréable à l’utile en ce qui concerne la participation aux cérémonies coutumières, la plupart du temps fixées en cette période où l’on est sûr que le ciel est clément et que beaucoup de gens seront disponibles. En somme, à chaque continent, ces réalités !!!
En réponse à toute la problématique ci-dessus abordée, l’état visuel des espaces ci-dessous montre à merveille que le temps a été bien mis à profit, à peine commencées les premières pluies. En somme, le repos demeure une illusion ou un simple flatus vocis.
Pour nous à Adjohoun, ce mois consacre la décrue des activités amorcées les mois précédents, avec des récoltes de noix de moins en moins abondantes. L’action à programmer au cours des prochaines semaines sera l’élagage des palmiers qui devra coïncider avec une des séances de récolte de noix, et ce pour faire d’une pierre deux coups.
La saison des pluies commencée timidement dans le sud du pays, rend propice le labour pour les cultures vivrières. Ce n’est pas seulement pour régler les nécessités d’ordre alimentaire ; le retournement du sol participe de sa régénération car, en inversant les couches supérieures du sol, il optimise l’aération ainsi que la structure du sol fertile et fait remonter les éléments nutritifs, autre à revigorer les plants déjà présents. À l’orée de la saison pluvieuse, s’enchainent moult travaux : labour, semailles, désherbage etc. En plus de quelques récoltes sporadiques de noix palmistes, s’ajouteront les travaux ordinaires de jardinage, sans oublier la reprise de la culture du riz. Nous bénéficierons à la mi-mai de l’aide de quelques stagiaires provenant du collège technique diocésain de Pobè, sur proposition du Directeur dudit centre, le Père Christian KIMBATOKPO. Mais leur présence ne durera qu’un mois. Il s’agit d’un stage pratique pour qu’ils expérimentent les exigences et la vie dans une ferme. Vivement qu’ils en profitent et se départissent du phantasme du fonctionnaire au col blanc. Nous y reviendrons.
Le jardin constitue toujours notre centre d’intérêt. L’état des papayers montre la justesse de la ligne choisie avec l’irrigation. Les papayers portent déjà de beaux fruits. Au fil des semaines, ils vont grossir puis murir; ce sera ensuite la phase des récoltes.
L’irrigation nous tient beaucoup à cœur. L’étendre sur une plus grande superficie offre d’une part une plus grande possibilité pour le jardinage. De l’autre, le prolongement va inclure peu à peu la palmeraie. Nous l’avons compris, l’eau demeure un élément déterminant. Au jardin, se limiter à un arrosage manuel n’offre pas une suffisante garantie pour de bonnes performances. Dans un tel système, le temps et la fatigue de chaque jour pèsent sur l’engagement à déployer dans d’autres secteurs lesquels requièrent des interventions urgentes. On se fatigue beaucoup pour peu de résultats. Un autre avantage de l’irrigation est son incidence sur la croissance des fruitiers. Souvent, ceux qui vendent ces plants précisent l’arc de temps pour qu’ils portent des fruits. Malheureusement, ils parlent peu de l’exigence de l’apport en eau ou de l’arrosage quotidien. À compter uniquement sur la pluie qui vient du ciel, ce temps fixé finit souvent par passer au double ou s’allonge indéfiniment, si entre temps le petit arbre ne subit pas les affres funestes d’une grande sécheresse. Tel fut le cas pour beaucoup de nos plants par le passé. Il n’en sera plus ainsi désormais.
Reprenons une thématique abordée il y a quelques mois: la production par nous-mêmes des tourteaux palmistes comme nourriture pour la porcherie. Les prévisions basées sur nos récoltes n’étaient pas fondées et ne résistent pas à l’épreuve des faits. En effet, notre production est notoirement en deçà des besoins. Par exemple, pour 1500 litres d’huile rouge extraite, on a recueilli environ 125 Kg de tourteaux et 100 litres d’huile palmiste. Cette quantité suffit à peine pour une semaine d’alimentation, de telle sorte que toute notre production couvrira à peine un bimestre. Il faut donc se lancer dans la recherche tous azimuts d’achat de noix palmistes. Certains désireraient savoir si le jeu en vaut la chandelle et s’il ne faut pas plutôt reprendre notre ancien système de nous procurer directement la provende. En réalité, l’huile extraite des amandes est autant prisée que celle des noix de palme. L’investissement pour l’achat de noix palmistes ainsi que le coût de la main d’œuvre ne sont pas à perte. La cession de l’huile compenserait les dépenses dans le secteur. Il suffira de bien suivre son cours sur le marché.