En remontant à la concaténation des causes pour aller vers l’Être suprême, le Philosophe ressent le besoin de mettre un terme à cette longue série de causalité en prononçant la phrase lourde de sens: “il faut s’arrêter”. Cette posture, requise à celui qui va à la recherche de l’Indicible, s’applique secundum quid à la vie existentielle de l’homme qui réfléchit sur sa destinée, son histoire et les œuvres. Il faut s’arrêter pour mesurer le temps parcouru, les péripéties et surtout apprécier ce qui a été fait, afin d’envisager de nouveaux horizons. L’arrêt constitue donc une étape qui ne bloque ni ne paralyse le progrès ; il le propulse plutôt vers d’autres défis enrichissants.
Dans le contexte de la Fondation KPECEHWE, l’arrêt est plus que nécessaire pour parcourir les temps d’incertitudes ou des choix décisifs, en ces dernières années où les fruits semblent tenir la promesse des fleurs. En effet, plus d’une décade s’est déjà écoulée. C’était en réalité vers la mi-août 2006, lors des vacances, que les Sœurs Antoinette AKakpo et Rufine Sonou m’ont accompagné voir de jeunes pousses de palmiers sélectionnés de la ferme de Mr Bonou Antoine. Les plants avaient été mis en terre, il y avait à peine 6 mois, et les deux religieuses me rassurèrent à force d’arguments, qu’après 4 ans de suivi, on pouvait commencer à récolter les fruits de ses labeurs. Cette initiative répondait réellement à ma préoccupation de trouver des revenus stables de financement pour les œuvres sociales dans lesquelles la sœur Antoinette et moi étions engagés depuis 1995.
Séduit par l’idée, je donnai mon accord pour l’acquisition d’un domaine d’au moins de 10 Ha. Au mois d’octobre 2006, on procéda à l’acquisition d’un premier domaine d’un 1,5 Ha sur lequel furent mis, les mois suivants, nos premiers plants. Nous espérions que les voisins cédassent les parcelles d’alentour afin d’atteindre la superficie désirée. Mais hélas, ce fut peine perdue ; pire, notre homme de main pour les opérations s’était aussi procuré des plants ordinaires et non sélectionnés. Au fil des premières années, nous dûmes procéder à l’engraissement systématique du sol face à une croissance rachitique des plants. Peine perdue. En dépit de la grande quantité de bouse de vaches et d’urée de lapin déversée, les branches des jeunes pousses se séchaient, comme s’il manquait toujours de véritables substances nutritives. En réalité, le sol était bien lessivé au fil des décades à cause de l’utilisation massive d’engrais chimiques. Cette mauvaise fortune va plus que jamais éveiller mon attention sur la nocivité de ces engrais et me faire proscrire sur les autres plantations leur utilisation, malgré la désapprobation de tous ceux et celles qui m’entouraient. Ils ne comprenaient pas les raisons de cette décision apparemment irréfléchie puisque c’était la norme enseignée et diffusée.
Les photos ci-dessous datent de 2010. Les palmiers avaient alors 3 ans ; en cette même année fut acquis une 504 bâchée d´occasion comme moyen de transport.
En 2007, grâce à la sœur Rufine Sonou, nous parvînmes à dénicher une autre parcelle plus grande, premier lot de ce qui constitue aujourd’hui la ferme Saint Mesmin. Elle s’étendait sur une superficie de 4,5 Ha et fut aussitôt recouverte cette fois-ci de bons plants.
Les deux premières années, nous eûmes recours à des ouvriers saisonniers qui, tous les 3 mois, assuraient la mise au propre du domaine. Mais l’estimation du coût d’entretien ainsi que la surveillance des lieux nous firent opter, en 2009, pour le recrutement d’un ouvrier permanent. Ce qui fut fait en la personne de Léon Bonou, un homme doté de qualités exceptionnelles comme l’honnêteté, le courage bravant toute épreuve, l’ardeur et l’assiduité au travail, une empathie pour l’œuvre de la Fondation.
Avec les deux champs, le maintien au propre du domaine devenait un problème en dépit des nombreux sous engagés. Les seuls bras valides de Léon ne pouvaient y suffire et les ouvriers saisonniers recrutés à cet effet, montaient souvent les enchères, en raison de l’exode rural des jeunes de la vallée de l’Ouémé préférant aller s’exercer en taximan-moto en ville, quand ils ne s’expatrient pas au Nigéria voisin. La décision de tendre vers une motorisation en 2010 s’imposait. Les premiers jours d’octobre 2011, le Père Martin Chognika négocia pour nous, auprès des sœurs de Saint Gérard de la paroisse Saint Pierre et Paul de Porto Novo, un tracteur Fiat de seconde main. L’acquisition fut aussitôt faite au prix de 2, 3 millions de francs CFA.